Nous savons tous que le mensonge fait partie de la politique, et que les manipulations comptables et financières sont courantes. Rien de très neuf et pas de quoi écrire un billet sur le ton du scoop. Chaque semaine, de nouvelles informations, rarement dans les médias dominants, lèvent un pan de voile sur tel soupçon de manipulation des cours, telle réforme comptable destinée à donner de meilleurs résultats statistiques, ou une étrange sensation d'inadéquation entre le niveau des marchés et la réalité de la situation économique vécue par le citoyen lambda.
Ce qui est nouveau, ce n'est pas l'existence de tous ces faits, mais les proportions de plus en plus graves qu'ils prennent et les conséquences désastreuses qu'ils ne vont pas manquer de provoquer.
Il m'a paru intéressant à ce stade de tenter de dresser un tableau, forcément incomplet et imparfait, de l'état des choses en cette époque formidable que nous avons le privilège de vivre.
Nous avons évoqué le scandale du Libor et écrit un précédent billet sur les incroyables manipulations des marchés de l'or et de l'argent, sur lesquelles nous allons revenir. Nous allons voir a quel point il est difficile aujourd'hui de chercher a conserver un capital pour les coups durs ou ses vieux jours.
Dans une société administrée selon des critères keynésiens, les bons élèves sont les consommateurs et ceux qui vivent a crédit, et les privilégiés ceux qui bénéficient de la manne assurée de l'Etat sous forme de salaire (fonctionnaires) ou d'amortisseurs sociaux (assistés).
Mettre de l'argent de côté c'est mal, car c'est de l'argent qui n'augmente pas le PIB au titre des dépenses, et en conséquence augmente le rapport dette/PIB. Donc ça limite les dépenses possibles de l'Etat et ça, c'est grave ! Il faut donc convaincre le citoyen que tout va très bien, qu'il peut faire la cigale et alimenter le système de ses dépenses keynésiennes. Pour ce faire on procède entre autres a une manipulation éhontée des règles d'évaluation du chômage et de l'inflation, aux USA comme en Europe.
L'excellent site http://www.shadowstats.com fait pour les USA un remarquable travail de démystification sur le sujet, malheureusement peu relayé par les médias. Concernant les chiffres du chômage en France, voilà la situation résumée avec humour par H16 :
"Pour le chômage, ne vous inquiétez pas : les tours de passe-passe statistique suffiront à pipeauter le peuple. Dans mon godet droit, la catégorie A. Dans mes deux autres godets, du vide élyséen. Je déplace un peu par ici, un peu par là, zip, zoup, la main est plus rapide que l’œil, zip, zoup, catégorie D, catégorie E, ni vu, ni connu, zip, zoup, et où sont les chômeurs ? Dans le godet du milieu ? Non. Dans le godet de droite ? Non plus. Celui de gauche ? Eh non. Disparu. Pfuit. Sacré François."
Pour l'inflation citons le Big Mac index que présente Simone Wapler dans sa "Stratégie" :
"Depuis la fin des années 1980, The Economist compile le Big Mac Index (BMI) qui suit le coût du hamburger dans le monde. Initialement, le but du BMI était de comparer les pouvoirs d’achat dans le monde. Mais si vous suivez le BMI par pays, vous avez l’idée de l’évolution du coût de quelque chose de standard qui comporte :
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Des matières premières (viande, soja, crudité, moutarde, tomate, céréales,…)
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Du service (des préparateurs et une caissière qui vous le jette sur un plateau, du wifi mis à disposition gracieusement dans le fast food, etc.)
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De l’immobilier (ce sont des boutiques en dur dans les villes)
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De l’énergie (livraison des approvisionnements et cuisson)"
Pour reprendre les données reportées par Simone Wapler, depuis 1986, aux Etats-Unis, le Big Mac a augmenté de 173% tandis que l’indice des prix, tel que mesuré par des fonctionnaires payés par la puissance qui émet les dollars, a augmenté de 110%. En Europe, depuis 2000 l'indice des prix est de +25% et l'indice Big Mag de +41%.
L'inflation réelle est sans aucun doute possible très supérieure à l'inflation officielle, ce qui justifierait un loyer de l'argent bien plus élevé de la part des banques centrales. De même la situation des finances publiques des USA et de la plupart des pays européens justifierait des taux obligataires bien supérieurs. Seulement voilà, des taux plus élevés impliquent automatiquement une faillite assurée des mêmes Etats. Tout est donc fait pour maintenir par tous les moyens les taux au plus bas et dissuader les capitaux de se placer sur des placements jugés plus surs en matière de préservation du capital (or, immobilier...)
Parmi l'arsenal de mensonges destinés a maintenir des taux faibles, citons le fait de considérer les obligations souveraines comme des actifs triple A dans les capitaux propres des banques, ou le fait de soustraire les dettes hors bilan des comptabilités nationales, alors elles représentent 500% du PIB selon Paul Singer de Elliott Management.
Au titre de la manipulation et du vol, il y a les opérations orchestrées, avec l'aide des "bullion banks", des banques d'affaire et de la presse, visant a faire chuter le prix de l'or pour dissuader les investisseurs en recherche de protection contre l'inflation. Pour l'immobilier ce sont les lois de plus en plus liberticides et les impôts en augmentation constante.
Nous avons des marchés actions en totale lévitation, qui battent des records aux USA et en Europe alors que la situation économique est calamiteuse. Les bonnes nouvelles entrainent une hausse des indices, et les mauvaises nouvelles entrainent...une hausse des indices (??!!) car elles renforcent la probabilité d'un maintien des politiques monétaires "accommodantes", un euphémisme pour qualifier la course à l'impression monétaire des banques centrales.
Reprenons ici ce qu' écrivait le site Zonebourse le vendredi 17 mai :
"La semaine s'achève sur un gain de +1,2% et c'est la 4ème hausse hebdo consécutive avec +12% repris sur les planchers d'avril sans aucune consolidation intermédiaire, ce qui est absolument exceptionnel, surtout vu le contexte macro-économique et la stagnation des profits depuis 6 mois." Concernant le Dow Jones : "Il faut noter que 16 vendredi sur 19 se sont soldés par des hausses du marché, peu importe la teneur des statistiques (ou leur absence de signification), et ce n'est rien en comparaison des 18 mardi de hausse consécutive sur le Dow Jones (qui ressemble d'avantage au 'manège enchanté' qu'à un indice reflétant -même de très loin- la réalité économique ou des hypothèses de croissance des profits plausibles)."
Un investisseur aujourd'hui, qu'il soit particulier ou professionnel en charge des fonds de milliers de retraités, a le choix entre :
- des obligations aux rendements très inférieurs à l'inflation, et au risque très supérieur a ce qu'indiquent leur taux
- des marchés actions en situation de bulle totale
- un marché immobilier en situation de bulle (France, Chine) ou de crise (Espagne, USA)
- un marché des métaux précieux manipulé à la baisse
- des livrets A ou contrats d'assurance-vie dont tous les signes avant-coureurs annoncent qu'ils seront réquisitionnés en cas de difficultés financières de l'Etat.
Tout cela dans un contexte d'anémie économique et de frénésie de la planche a billets qui annonce immanquablement une hyper-inflation dans les années qui viennent.
Le tout a une époque ou plus de 50% des réactions boursières sont commandées par des ordinateurs.
Vous en avez assez de ces mensonges, de cette incertitude, de ce manque de visibilité pour votre avenir, du racket fiscal et des lois toujours plus liberticides ? Vous voulez juste protéger les quelques 20% d'argent net qui vous restent après un dur travail et le racket organisé de la TVA/charges sociales/IS/IR/CSG/RDS/ISF et contributions exceptionnelles ?
Attention ; la lutte contre les "paradis fiscaux" est a son comble, et les Etats soit disant "de droit" n'hésitent pas a récupérer des données volées et peut être même a les trafiquer pour soutirer des informations aux autorités des mêmes "paradis fiscaux".
L'Etat avait déjà le monopole de la violence, bien qu'avec l'aide des juges il le délègue assez facilement aux criminels depuis des années (mais surtout pas aux victimes).
Mais il semble qu'à présent il revendique aussi le monopole du mensonge et de la dissimulation. Sauf que cette fois la tolérance des juges est destinée aux grands délinquants, ceux de la finance et de la politique.
La première mission des gouvernants devrait être d'assurer la plus grande visibilité possible eux citoyens et aux entreprises, afin que ceux-ci puissent s'organiser, investir, faire des projets et prendre des risques à partir de données fiables et relativement constantes dans le temps. La triste réalité est que nos gouvernants s'acharnent a faire exactement le contraire. Présidents, ministres, gouverneurs de banques centrales ; c'est le concours des petites phrases qui disent une chose et leur contraire, des promesses jamais tenues, des cacophonies gouvernementales, et des distorsions de la réalité.
Le citoyen lambda sent bien que la situation est très éloignée de ce que veulent lui faire croire les François Hollande, Barack Obama, Ben Bernanke ou Shinzo Abe.
Il essaie de protéger ses réserves pour l'hiver, soit en s'exilant, soit en achetant des pièces d'or, soit en achetant un bien immobilier, ou encore en mettant ses maigres économies sur un Livret A.
Mais sur tous ces plans il se retrouve traqué, acculé, racketté ou essoré par des nouvelles lois incessantes qui changent radicalement les règles du jeu. Des lois redéfinies en permanence par des politiques et des technocrates dont le seul objectif est de rechercher et taxer sans cesse toute création de richesse afin d'assurer leur survie, et de barrer la route a tout investissement qui n'alimente pas leur folie dépensière.
Au moment ou j'écris ces lignes l’indice Nikkei gagne +50% (!!!) depuis le début de l’année grâce a une création monétaire absolument délirante qui est déjà en train de provoquer des bulles chez les voisins du Japon et qui va signer l'arrêt de mort de l'économie japonaise.
Les conséquences seront des drames humains en cascade pour lesquels les fabricants de monnaie de singe ne seront jamais sanctionnés, alors qu'ils récoltent actuellement les satisfecit de la communauté keynésienne, c'est à dire la grande majorité des politiques, financiers, économistes et journalistes.
Aux Etats-Unis et en Europe, les marchés sont littéralement suspendus aux lèvres de Bernanke et Draghi, et ne connaissent plus le mot consolidation. Si les grands prêtres Keynésiens prononcent les oracles QE, LTRO, baisse des taux, l'allégresse s'empare des foules. Si celles-ci craignent un arrêt des opérations et que les grands prêtres déclarent seulement ne pas considérer leur arrêt immédiat, la même allégresse envoie les marchés sur de nouveaux sommets.
Le S&P 500 a progressé de 40 % en 6 mois et n'en finit pas de battre des records historiques alors que les observateurs sérieux et l'américain moyen savent bien que la réalité économique n'a aucun lien avec ces valorisations.
En France, grand pays malade de l'Europe dont la presse étrangère regarde avec perplexité les stratégies d'évitement de Normal 1er, le CAC 40 flotte en apesanteur.
Il est proprement hallucinant que les leçons de l'histoire soient ainsi méprisées par ceux qui ont la responsabilité de protéger leurs citoyens et de contribuer a construire pour eux les fondements d'un avenir meilleur. Keynes est a nouveau le fabuleux prétexte pour dépenser encore plus et régler la note plus tard. Les Cassandres n'ont rien compris ; "This time is different !"
Malheureusement, ne sont différents ni les temps, ni la totale absence de responsabilités qu'assumeront ceux-là mêmes qui, pour leur bénéfice personnel, préparent d'énormes difficultés à venir pour de très larges parties de la population.
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